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À la suite du reportage d’investigation de la RTBF réalisé par Fabrice Gérard et Julien Montfajon (« attentats de Bruxelles, les oubliés du 22 mars »), diffusé ce 5 octobre 2022, la STIB a publié un communiqué à l’attention de son personnel, afin de démentir les déclarations faites par Christian Delhasse, le conducteur du métro.

Le communiqué de la STIB a profondément peiné Christian, qui ne comprend pas pourquoi la STIB s’acharne à ce point sur lui. Les déclarations de la STIB publiées peu de temps après la diffusion du reportage l’ont considérablement affaibli sur le plan psychologique. « Je vais encore plus mal aujourd’hui », a-t-il confié à Life4Brussels. En participant au reportage de la RTBF, Christian n’a jamais eu l’intention de nuire à son ancien employeur. Seul le fait de témoigner et dire la vérité lui importait. Si des lacunes avaient pu exister dans le chef de la STIB, cela aurait été l’occasion d’y remédier.

Quant au soutien psychologique…
Dans sa communication, la STIB déclare « avoir soutenu Christian, lui avoir prêté une attention particulière et l’accompagner encore aujourd’hui dans ses démarches auprès des assurances ». La STIB mentionne également qu’« une aide psychologique a été mise en place par ses soins le 22 mars, qu’elle a également été activée le jour même, et régulièrement dans les semaines et mois qui ont suivi ». (…) Selon la STIB, « Christian aurait également eu la possibilité de recourir à un service externe de psychologues spécialisés dans les traumatismes liés à des attentats ».
Christian ne peut adhérer à ces déclarations, puisqu’à l’exception de Monsieur de Saint Moulin, qui prenait de temps à autre de ses nouvelles, et qui lui a écrit une carte à l’occasion, personne n’a jamais pris contact avec Christian parmi la direction de la STIB, que ce soit le 22 mars 2016 ou durant les années qui ont suivi. Le directeur de la STIB s’est contenté de le rencontrer au Palais Royal à l’occasion d’une invitation par le Roi et la Reine en 2016.
Quant à l’aide psychologique que mentionne la STIB, Christian n’en entendra jamais parler. Jamais aucun psychologue ne le contactera à ce propos. Il se souvient avoir passé sa visite médicale annuelle quelques années plus tard. À l’occasion de cette visite, une personne lui demandera pourquoi il ne parvient pas à dormir et pourquoi il va si mal. Il répondra qu’il conduisait le métro impacté par les attentats et qu’il est, depuis, profondément marqué. Son dossier médical ne mentionnait même pas qu’il était le conducteur du métro dans lequel le kamikaze s’est fait exploser !

Quant aux démarches entreprises auprès des assurances…
En ce qui concerne l’accompagnement de Christian dans ses démarches auprès d’Ethias, l’association Life4Brussels ne peut qu’être profondément étonnée par les propos de la STIB qu’elle se doit de contester, à la lumière des démarches qui ont été véritablement entreprises par les avocats de l’association Life4Brussels.
Des représentants de Life4Brussels ont rencontré Christian Delhasse en audience de la Chambre des mises en accusation en juin 2021. C’est alors qu’ils ont appris que Christian n’avait jamais été indemnisé par Ethias. Les avocats de l’association ont alors contacté la STIB afin de leur demander si des démarches avaient été entreprises auprès des assurances dans les mois ou les années qui ont suivi les attentats. La STIB y a malheureusement répondu négativement, puisque jamais aucune démarche n’avait été faite durant ces 5 années.
La STIB a également fait savoir que « ce n’est que récemment, quelques mois après son départ en prépension qu’elle a appris que Christian souhaitait avoir accès à une indemnisation. Les collègues des ressources humaines ont immédiatement mis tout en oeuvre pour l’accompagner dans cette démarche et lui ouvrir un dossier auprès d’Ethias quand bien même le délai de prescription était dépassé. Ce dossier est ouvert et nous continuons à nous assurer auprès d’Ethias du bon suivi du dossier ».
La STIB tente de nous faire croire qu’elle est à l’origine des démarches entreprises afin de permettre à Christian de pouvoir être indemnisé plus de six ans après la survenance des attentats de Bruxelles, et ce alors même que c’est la combativité des avocats de l’association Life4Brussels qui a permis à Christian de pouvoir ouvrir un dossier auprès de l’assurance de la STIB.
La STIB déclarera également qu’« à aucun moment Christian n’a souhaité ouvrir de dossier d’accident du travail auprès des assurances de la STIB. Légalement, l’employeur ne peut constituer un tel dossier à l’insu de son collaborateur ».
Comment Christian aurait-il pu formuler une telle demande, puisque personne ne l’en a jamais informé, ni la STIB, ni l’État belge ? Il se souvient d’ailleurs qu’une personne travaillant aux ressources humaines lui avait dit qu’elle « rédigerait un document au cas où il arrivait quelque chose plus tard ». Christian ne sait pas si ce document a bel et bien été rédigé, car il n’a, en tous les cas, jamais rien reçu.
L’association Life4Brussels tient à rappeler à la STIB, qu’en tant qu’employeur, elle a l’obligation légale de déclarer, dans un délai de huit jours de sa survenance, tout accident survenu sur le lieu du travail. C’est ensuite à l’assureur-loi (à qui l’accident est déclaré par l’employeur) d’apprécier s’il s’agit d’un accident du travail. Dans le cas de l’explosion survenue le 22 mars 2016 dans le métro, il s’agissait bien d’un tel accident pour le conducteur du métro. Conformément à l’article 62, al.1, de la loi du 10 avril 1971, la STIB aurait effectivement dû déclarer cet accident auprès d’Ethias.

Quant à sa volonté de reprendre le travail que la STIB dit avoir respectée…
Ce qui a davantage choqué Christian, ce sont les propos contraires à la vérité de la STIB qui déclare qu’au « lendemain de l’attentat, bien qu’ayant d’abord bien vérifié qu’il s’agissait là de son souhait et que c’était la décision qu’il voulait prendre, son management a respecté ce choix de reprendre la conduite, parce qu’il y tenait et parce que cet acte semblait constituer pour lui une sorte de thérapie ».
Ces propos ne peuvent qu’être réfutés. Le 23 mars 2016 à 5h, Christian se trouvait seul à la station de métro Gare de l’Ouest, lorsqu’il a pris son service. Aucun responsable ne lui a demandé s’il souhaitait reprendre le travail et en l’occurrence conduire à nouveau le métro, s’il s’en sentait capable. Personne ne le lui a jamais demandé !
La STIB mentionne également que « Christian était accompagné par un collègue ».
Christian déplore à nouveau ce mensonge, puisqu’en réalité la STIB fait référence à un collègue que Christian n’a fait que déposer à la gare Centrale le 23 mars 2016.

Quant à la personnalité de Christian par laquelle la STIB tente de justifier son manque de soutien …
Christian est effectivement une personne discrète, qui ne se plaint pas. Ce trait de caractère ne devait pourtant pas empêcher la STIB de se montrer davantage humaine, ni même de l’informer de ses droits en lui proposant notamment d’entreprendre des démarches auprès des assurances, tout en le soutenant dans celles-ci.
Si Christian est resté debout durant toutes ces années, c’est parce qu’il se devait de conserver son salaire pour diverses raisons, notamment parce que sa femme était très malade. Son épouse, son pilier, est malheureusement décédée en janvier de cette année. Christian ne pouvait cesser de travailler malgré les attentats, alors qu’il avait besoin d’argent pour vivre, et notamment pour permettre à sa femme d’être soignée.
Dans son communiqué, la STIB insiste à plusieurs reprises sur le fait que « jamais personne ne pourra en faire assez pour les victimes du 22 mars ». Cependant, dans le cas de Christian, mais aussi celui d’autres employés de la STIB impactés par les attentats du 22 mars 2016, il ne lui est pas reproché de ne pas en avoir fait assez, mais plutôt de n’avoir absolument rien fait du tout ! La différence est de taille !

Quant aux mensonges systématiques de la STIB…
Ce n’est pas la première fois que la STIB a recours à de tels procédés. En 2018, la STIB annonçait par courriel à l’association Life4Brussels : « ne rien avoir prévu pour les victimes à l’occasion des commémorations du 22 mars 2016, à part le dépôt de gerbes de fleurs à la station Maelbeek par la direction de la STIB accompagnée d’une délégation du personnel en souvenir des victimes. » La STIB ajoutera que « la configuration de la station Maelbeek ne permet pas de s’y rassembler en grand nombre en même temps. Néanmoins, la station étant libre d’accès, nous préférons laisser à chacun la liberté de s’y rendre quand il le souhaite » (cf. email de Françoise Ledune du 7 février 2018).

À la suite de l’indignation des victimes, l’association Life4Brussels a dénoncé publiquement ce manque de considération de la part de la STIB.
La STIB, via le ministre bruxellois de la mobilité de l’époque, Pascal SMET, avait alors déclaré que « la STIB n’avait jamais refusé d’associer les victimes à ces commémorations (…) que la volonté de la STIB était de permettre à chacun : victimes, personnel et voyageurs de commémorer cet événement tragique en respectant les sensibilités de chacun. » La STIB avait alors déploré « l’émoi provoqué par cette annonce auprès de certaines victimes » et mentionné que « fort heureusement, une mise au point rapide a pu rétablir la vérité », sous-entendant ainsi que les victimes mentaient (cf. réponse du ministre Pascal Smet à la question écrite n° 1053 d’un député bruxellois).

La STIB s’enfonce…
Dans une interview publiée ce 13 octobre par la DH, la porte-parole de la STIB, Françoise Ledune rétorque que « Life4Brussels n’a pas vécu les attentats. Nous oui. Et de l’intérieur ». Bon nombre de victimes se sont offusquées de ces propos, les jugeant déplacés. En effet, Madame Ledune semble ignorer que ce sont des victimes des attentats de Bruxelles, accompagnées de citoyens soucieux de mettre leur humanité au service des victimes, qui ont créé cette association. Les 566 victimes que compte aujourd’hui Life4Brussels, ont bel et bien vécu ces attentats de l’intérieur, puisqu’ils les vécus dans leur chair.

Le souhait de Christian Delhasse…
Christian regrette enfin que certaines personnes, via certains réseaux sociaux, aient modifié le titre du reportage, en remplaçant « les oubliés du 22 mars », par « l’oublié du 22 mars ». Christian insiste sur le fait que « l’ensemble des victimes du 22 mars a été oublié, que celles-ci souffrent toutes de l’indifférence et de l’inertie l’État belge. Et que toutes devront porter à jamais ce lourd tribut que certains tentent de minimiser, voire de passer sous silence. »
Christian n’a qu’un seul souhait : celui « que chacune des victimes puisse être reconnue et traitée avec tout le respect et la dignité qu’elles méritent. Cela doit indéniablement se traduire par une véritable prise en charge des victimes du 22 mars 2016, qui doivent être impérativement informées de leurs droits et accompagnées dans chacune des trop nombreuses démarches qu’elles ont à accomplir » !