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Le 22 mars 2016. J'ai survécu à un attentat.

Le 22 mars 2016. J’ai survécu à un attentat.

Le 22 mars 2016. J’ai survécu à un attentat. Une part de moi s’est définitivement perdue dans un wagon de métro.
Nous sommes tant de personnes pour lesquelles cette date résonne au fond du cœur depuis 5 ans . Pour nous, survivants, il y a un avant et un après.
32 personnes ont perdu la vie ce jour là. Le souffle des bombes a emporté des hommes, des femmes, des époux, des enfants, des amis, des collègues. Ce souffle qui a ébranlé tout un peuple, toute une organisation, tout un mode de vie.
Il y a celles et ceux qui l’ont vécu de l’intérieur et qui le gardent en eux, 5 ans plus tard, comme un combat de vie toujours à mener.
Nous étions nombreux ce jour là, que ce soit dans le hall de l’aéroport de Zaventem ou dans le métro, station Maelbeek. Nous avons vécu l’inconcevable, nous avons vu l’innommable, nous avons senti l’odeur du drame, nous avons entendu le silence, les râles, les sirènes, les hélicoptères. Nous avons parfois oublié, à tel point l’impact était puissant. Nous avons cherché, attendu, perdu, espéré pour des personnes qui nous sont chères. Nous avons parfois endossé toutes ces souffrances en même temps.
Certains sont venus nous protéger, d’autres nous soigner, ils ont fait face à l’horreur et restent encore marqués aujourd’hui.
Certains sont restés dans l’ombre, certains ont raconté, certains se sont rencontrés, certains sont partis.
Certains ont passé quelques heures à l’hôpital, d’autres s’y sont battus des semaines, des mois, des années et d’autres s’y battent encore.
Certains ont dû commencer un travail de deuil, certains ont entamé une vie faites de trajets incessants vers l’être écorché.
Nous sommes liés par la blessure. Nous sommes liés par la vie à reconquérir. Par une place à retrouver, malgré la peur, les souffrances, les douleurs, les démons, les souvenirs, le présent.
Durant 5 ans j’ai eu la chance de rencontrer d’autres survivants, des familles, et de partager ce mal qui ronge et qui parfois nous accable mais aussi de partager du courage et un élan vital.
J’ai eu la chance d’entendre et de lire des témoignages qui m’ont donné de la force.
J’ai eu la chance d’être accompagnée dans pleins de domaines par l’association de victimes Life4Brussels qui est née par le besoin de solidarité et qui soutient et accompagne les victimes avec acharnement et détermination depuis 5 ans.
J’observe de loin, via les médias, par les livres, d’autres survivants qui ne me connaissent pas mais qui sont pour moi des héros, des combattants, et qui m’aident moi aussi à mener ma bataille, à me reconstruire, à aller de l’avant.
Ces 5 années ont été épuisantes, à la recherche d’aide, de reconnaissance, d’appuis. Elles ont été très intenses physiquement et psychologiquement. Elles ont ébranlé nos proches, nos familles, nos enfants. Il a fallu parfois changer de métier, d’horizon, de projet. Parfois tout arrêter. Il a fallu se confronter, parfois seul, parfois entouré.
Aujourd’hui, après avoir participé à la publication des portraits des 32 vies fauchées par cet acte fanatique, je voudrais rendre hommage aux survivants, aux personnes présentes sur les lieux, aux soignants, aux policiers, aux personnes qui nous ont soutenu et continuent à le faire, à l’association Life4Brussels , aux organisations; à tous ceux et celles qui fêtent aujourd’hui, comme moi, le triste anniversaire des attentats de Bruxelles.
Christelle Giovannetti.