Mélanie DEFIZE, 29 ans
La veille, elle était rentrée tard. En bonne professionnelle, elle avait assisté, le lundi 21mars, à la soirée des Octaves de la musique, la remise des prix annuelle organisée à la salle de la Madeleine à Bruxelles. Le matin des attentats, ses proches se raccrochaient à l’espoir d’un départ plus tardif vers son lieu de travail. Mais, rapidement, ils ont compris qu’elle se trouvait dans la rame de la station Maelbeek, dont les images défilaient en boucle sur tous les écrans.
Mélanie Defize allait avoir 30 ans en octobre. Ses proches retiennent de cette musicologue passionnée une authentique humilité doublée d’une tenace suite dans les idées.
Après une scolarité sans accroc, option latin-math, à l’Institut Sainte-Marie à Huy, menée parallèlement à une formation ininterrompue au violon depuis l’âge de 5ans, Mélanie entame à Namur des études de médecine. Séduite par la dimension humaine de la profession, elle y avait sous-estimé l’aptitude aux sciences dures qu’exige d’emblée la première année. Elle retourne alors vers son inclination de toujours, l’étude de la musique, à l’Université catholique de Louvain et par la suite à l’Université de Liège, y décrochant un master en musicologie et histoire de l’art.
Dans le même temps, insatiable, toujours à l’écoute de ses goûts, elle multiplie les expériences en suivant un de ses professeurs favoris dans l’équipe du programme Ricercar de l’Université de Tours. Mélanie a compris qu’aucune opportunité ne doit être négligée. L’Opéra royal de Wallonie lui commande même ses programmes et présentations d’opéras.
L’idée d’articuler les deux passions de vie, la médecine et la musique, ne l’avait toutefois pas abandonnée. C’est à Montpellier qu’elle entame alors un nouveau cursus de musicothérapie. Qu’elle abandonne un an plus tard lorsque Cypres Records, un label de musique indépendant basé à Bruxelles, où elle s’était fait remarquer lors d’un stage, lui propose un poste d’assistante d’édition et de production. Un métier exigeant qui l’appelait à découvrir des talents, à les mettre en relation, à nourrir pour eux une aventure musicale commune. Un travail de l’ombre qui convenait à sa nature à la fois discrète et déterminée. Elle s’y épanouissait, goûtait l’effervescence culturelle de la capitale, traçait sans bruit sa propre route. “Mélanie n’a jamais aimé se mettre en avant, mais arrivait toujours à ce qu’elle voulait” , résume sa maman.
Mais tout cela n’était pas suffisant. Le samedi matin, elle se levait à 4heures et sautait dans le premier Thalys vers Paris en vue de décrocher un master en musicothérapie à Paris Descartes. Elle revenait le soir même, éreintée mais enchantée. Elle y caressait l’espoir de mener à bien une recherche en rythmologie, en mettant en évidence un parallèle entre le battement d’un cœur et le tempo d’une œuvre. L’originalité du projet avait séduit dans ce cursus suivi presque exclusivement par des diplômés en médecine.
Désormais bien établie dans la vie, Mélanie avait, en septembre dernier, choisi de se rapprocher de son lieu de travail. A Liège, elle avait préféré une colocation de l’avenue de Beaulieu à Bruxelles. A dix stations de métro de son lieu de travail…
Xavier Ducarme, La Libre